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Plus de 300 000 animaux ont été utilisés illégalement par les labos français entre 2015 et 2020, d’après One Voice

Plus de 300 000 animaux ont été utilisés illégalement par les labos français entre 2015 et 2020, d’après One Voice

Le nouveau rapport de l’Union européenne sur les chiffres de l’expérimentation animale en 2019 vient de sortir. Comme le rapport précédent, il rend compte de l’utilisation d’expériences pour lesquelles des alternatives existent depuis plus de dix ans. Selon l’association de défense animale One Voice, la France a un rôle prépondérant dans ces utilisations qu’elle juge illégales.

 

Le 25 juillet 2022, One Voice envoyait une lettre au ministère de la Recherche pour demander des explications sur les raisons de l’utilisation illégale en France des animaux à des fins scientifiques, sur les sanctions prévues pour les établissements responsables et sur les mesures mises en place pour s’assurer de n’accepter désormais aucun projet d’utilisation d’animaux lorsque des alternatives existent.

Une directive européenne qui vise la limitation de la souffrance animale

La directive européenne de 2010 sur l’utilisation des animaux à des fins scientifiques prévoit que « l’utilisation d’animaux à des fins scientifiques ou éducatives devrait […] être envisagée uniquement lorsqu’il n’existe pas de méthode alternative n’impliquant pas l’utilisation d’animaux ». Si pour le moment « il est souhaitable de remplacer l’utilisation d’animaux vivants dans les procédures par d’autres méthodes qui n’impliquent pas leur utilisation, l’utilisation d’animaux vivants demeure nécessaire pour protéger la santé humaine et animale ainsi que l’environnement », l’objectif final reste « le remplacement total des procédures appliquées à des animaux vivants à des fins scientifiques et éducatives, dès que ce sera possible sur un plan scientifique ».

 

 

Le principe des 3R

Dès son premier article, la directive cite le principe des 3R, remplacement, réduction et raffinement : « Le remplacement et la réduction de l’utilisation d’animaux dans les procédures et le raffinement des conditions d’élevage, d’hébergement, de soins et d’utilisation des animaux dans ces procédures. » Plus loin, elle indique que « lors du choix des méthodes, il convient d’appliquer les principes de remplacement, de réduction et de raffinement en respectant strictement la hiérarchie de l’obligation de recourir à des méthodes alternatives ».

Selon greenfacts.org, les alternatives de remplacement désignent les méthodes permettant d’éviter ou de remplacer l’utilisation d’animaux, que ce remplacement soit complet (par exemple par des modèles informatiques) ou relatif (c’est-à-dire en utilisant des animaux ayant un moindre potentiel de perception de la douleur, comme certains invertébrés).
Les alternatives de réduction se réfèrent à toute mesure aboutissant à l’utilisation d’un nombre plus restreint d’animaux, à la maximisation des informations obtenues par animal testé. Les alternatives de raffinement désignent les changements apportés à l’élevage ou aux procédures expérimentales en vue de réduire au minimum la douleur et la détresse, et d’améliorer le bien-être des animaux utilisés à des fins scientifiques, de la naissance à la mort.

Une réglementation européenne non respectée en France

En plus du rapport de l’Union européenne sur les chiffres de l’expérimentation animale en 2019, l’association One Voice déclare avoir obtenu un document du ministère de la Recherche, « classeur regroupant les déclarations individuelles d’utilisations d’animaux des années concernées, qui contient des informations sur le nombre d’animaux, le type d’utilisation, la sévérité et ainsi de suite », données qu’elle a synthétisées dans un article. Les deux documents réunis lui ont permis d’affirmer que « plus de 250 000 animaux ont été utilisés illégalement en France entre 2015 et 2019, alors que les lobbies et les ministères ne laissaient pas de nous vanter la réglementation et l’obligation stricte d’utiliser les alternatives existantes. En ajoutant les données sur l’année 2020 […] on atteint plus de 300 000 utilisations illégales. »

Pour établir ce chiffrage, One Voice s’est intéressée aux « utilisations recensées comme problématiques dans le rapport de la Commission européenne et a fait la somme de ces utilisations dans les classeurs français. Cela regroupe des utilisations ne mentionnant aucune justification, et des utilisations tentant des justifications fallacieuses à nos yeux. »

 

 

◆ La France, une « championne »

D’après One Voice, entre 2015 et 2019 au sein de l’Union européenne, la France est responsable de près de 40 % des tests pyrogènes qui consistent à injecter une substance à des lapins et à mesurer l’apparition de fièvre, alors que les tests d’activation de monocytes in vitro sont une alternative à cette pratique. Six pays dans l’UE y ont encore recours, mais elle devrait dans les cinq ans totalement disparaître.

On a également réalisé en France, alors qu’il existe des méthodes alternatives, « plus de la moitié des tests de corrosion et d’irritation de la peau et des yeux de rongeurs, de lapins et de cochons » ainsi que « 95 % des utilisations de rongeurs pour produire des anticorps monoclonaux par la méthode douloureuse de l’ascite, alors que dès 1998, l’ECVAM affirmait que “la production d’anticorps monoclonaux par la méthode de l’ascite n’est plus scientifiquement nécessaire, sauf dans certains cas exceptionnels”. En 2020, elle est même allée plus loin, en affirmant que “la production d’anticorps par la méthode de l’ascite ne devrait plus être acceptable, quelles que soient les circonstances”. »

 

 

Pour One Voice, cette technique de l’ascite, qui permet d’injecter des produits dans l’abdomen de rongeurs pour y cultiver des anticorps, est révoltante : « C’est stressant et douloureux pour les animaux, jusqu’au moment où les anticorps sont prélevés et les animaux tués. Les excuses communes pour l’utiliser aujourd’hui sont que c’est plus rapide que les méthodes alternatives et que quelques cultures in vitro ratent, mais on voit difficilement comment ça pourrait justifier de faire du mal à des animaux plutôt que de relancer des cultures in vitro en y mettant les moyens. »

Les noms des établissements déclarants ayant été occultés dans le document du ministère de la Recherche fourni à One Voice, nous ne pourrons donc interroger certains laboratoires pour avoir leur point de vue sur la légitimité et la légalité de telles pratiques, comme nous aurions aimé le faire.

 

👉 Lire notre dossier « Animaux de laboratoire : il y a tromperie sur le nombre ! » dans le Nexus n°135 :

👉 Retrouvez notre enquête « Électrification des sols : oh la vache ! » réalisée auprès de géobiologues, d’éleveurs et d’élus engagés, dans le Nexus n° 139 :

 

👉 Lire nos deux articles (en accès libre) sur l’expérimentation animale  :

« Expérimentation animale. On persiste malgré les échecs et les alternatives » (Nexus n° 111 juillet-août 2017)

 

« Animaux cobayes ou modèles animaux ? » (Nexus n° 121 mars-avril 2019)

 

 

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