ENTRETIEN EXCLUSIF. Christian Perronne : "À Garches, nous avons de bons résultats avec l’hydroxychloroquine"
Fervent défenseur du traitement à l’hydroxychloroquine et à l’azithromycine, pour le Pr Christian Perronne la question de son efficacité ne se pose plus. Chef du service infectiologie de l’hôpital Raymond-Poincaré de Garches, il le constate tous les jours depuis le début de l’épidémie : le traitement du Pr Raoult soigne et réduit considérablement les passages en réanimation. Il nous raconte dans cette interview comment ses collègues et lui ont décidé d’appliquer ce protocole pour respecter leur serment d’Hippocrate, et il dresse un tableau stupéfiant de la situation politique et sanitaire que vit la France depuis plusieurs semaines. Entretien exclusif avec le Pr Christian Perronne.
Entretien complet à écouter ici :
◆ NEXUS : Alors que la polémique enfle depuis plusieurs semaines dans le pays, divisant les Français sur le Pr Raoult, pourquoi avez-vous décidé d’appliquer le protocole hydroxychloroquine/azithromycine dans votre service ?
Pr Christian Perronne : On s’est intéressé à cette piste depuis le début de l’épidémie en Chine. Au départ de l’épidémie, les Chinois ont essayé en urgence différentes molécules qu'ils avaient sous la main. Ils ont essayé des tas de trucs : la colchicine, le Tamiflu, la chloroquine et le remdésivir. Mais ils ont vu qu'il y avait deux produits qui avaient l'air de fonctionner, la chloroquine et le remdésivir qui est uniquement intraveineux et avec des effets secondaires possiblement très importants et encore peu connus. Ensuite, il y a une étude qui est sortie du lot sur 66 malades avec pneumonie, avec tirage au sort, avec ou sans traitement par hydroxychloroquine, en excluant les cas les plus sévères. Les Chinois ont montré qu'ils obtenaient quand même un bénéfice important avec ce traitement, en raccourcissant la durée des symptômes et de la fièvre, et tous les cas qui s'étaient aggravés étaient dans le groupe des personnes non traitées.
Puis, l'étude de Raoult est sortie, sur 24 malades. Nous avons tout de suite commencer à donner de l'hydroxychloroquine à l'hôpital de Garches sur les formes moyennement sévères. Mais certains virologues nous avaient dit qu'il fallait plutôt utiliser du Kaletra, mon équipe s'est laissée influencer et nous en avons prescrit pendant quelques temps, mais on n'avait pas vraiment l'impression que ça faisait quelque chose. Du coup, on a pris la décision collégiale à l'hôpital de mettre tous les patients atteints de formes moyennement sévères, surtout en cas de pneumonie, sous azithromycine et hydroxychloroquine, sous surveillance cardiaque en respectant les contre-indications. On a veillé à mesurer le potassium dans le sang (kaliémie), vérifié les contre-indications médicamenteuses et surveillé l’électrocardiogramme. C’est ce que nous faisons systématiquement. Il faut être d’autant plus prudent que l’on s’aperçoit que le Covid-19 peut entraîner des atteintes cardiaques, même en l’absence de traitement. Il faut éviter à tout prix l’automédication qui est risquée.
◆ NEXUS : Vous avez refusé de participer à l’étude Discovery, pourquoi ?
Pr Christian Perronne : Car celle-ci est uniquement destinée aux malades ayant des formes sévères, et que le traitement fonctionne en début de symptomes moyens. De plus, nous avons refusé car ce n'est pas éthique de proposer de faire un tirage au sort sur des gens qui risquent de mourir. Enfin, dans cet essai ils ne testent pas exactement il manque l'association primordiale avec l'azithromycine. D'un point de vue éthique, pour moi c'est contraire au serment d'Hippocrate de rentrer dans ce type d'études. Je ne suis pas contre les études randomisées quand on peut évaluer tranquillement les choses. Là, on est dans une médecine de guerre avec des centaines de morts par jour.
◆ NEXUS : Avez-vous eu des résultats cliniques positifs dans votre service depuis que vous avez généralisé le traitement à l’hydroxychloroquine et à l’azithromicyne ?
Pr Christian Perronne : Cela a changé la donne. Même les médecins de service et les infirmières le confirment, on passe beaucoup moins de malades en réanimation. On n’attend pas de donner l’hydroxychloroquine qu’aux cas les plus graves comme l’impose le décret du ministère de la Santé et l’étude Discovery. Par contre, on n’en donne pas non plus aux formes bénignes. On le donne dès qu'il y a un début de pneumonie ou des signes de gravité moyenne, sauf contre-indications. Nous allons bientôt compiler l’ensemble de nos données.
◆ NEXUS : Qu'est-ce que vous avez à répondre à tous ceux qui préfèrent attendre les résultats des études et tout miser sur la méthodologie académique ?
Pr Christian Perronne : C’est incompréhensible car, quand ils auront les certitudes, les résultats définitifs, l'épidémie sera terminée et tout le monde sera mort. On ne peut pas faire comme si on était en période de paix. Je connais certains qui composent le haut conseil scientifique, ce sont des experts du sida, ils raisonnent comme si on avait affaire à une épidémie chronique du sida. Ils se disent « on a le temps, on fait bien les choses, on évalue avec les canons de la méthodologie, etc. ». Mais il faut se bouger maintenant ! Qu'est-ce qu'on en a à faire d'avoir un placebo, un groupe témoin, si on guérit beaucoup de gens ? Là, on est dans une situation de guerre. Il y a des centaines de morts tous les jours et attendre encore les résultats de l’étude Discovery, c'est bien joli, mais personne ne sera traité à temps en faisant cela. En temps normal, on a le temps d'attendre 6 mois pour qu'un article soit publié. Mais vous imaginez durant cette épidémie, à chaque fois que vous avez des données super importantes, il faut attendre qu'un journal l'accepte, qu'on perde 3 mois, mais c'est scandaleux !
◆ NEXUS : Un grand nombre de médecins nous a dernièrement témoigné en off qu’ils s’étaient soignés avec la bithérapie hydroxychloroquine/azithromycine mais malheureusement, ils n'osent pas pour la plupart témoigner publiquement.
Pr Christian Perronne : Les gens ont peur des représailles. D’ailleurs ce qui me frappe, c'est que des confrères que je connais qui sont des grands défenseurs de l’étude Discovery et de l’attente des résultats de l’étude, quand eux sont tombés malades, ils ont cherché à se procurer à tout prix de l'hydroxychloroquine et de l'azithromycine pour se soigner !
◆ NEXUS : On entend souvent que l'hydroxychloroquine a un bon profil de tolérance. Qu'est-ce que cela veut dire ?
Pr Christian Perronne : C’est le recul que l’on a sur les effets secondaires d’un médicament. L'Agence du médicament a des signalements sur les effets secondaires enregistrés depuis le début de la commercialisation de tous les médicaments. L’hydroxychloroquine était en vente libre jusqu’au mois de janvier 2020 et il est sur le marché depuis des décennies. Après, je reconnais qu'il y a eu des accidents cardiaques, mais ils sont quand même très rares. Il faut dans tous les cas encadrer la prise par un médecin pour éviter les surdosages et les contre-indications. Donc, je suis entièrement d'accord qu'il faut être très prudent et le faire sous surveillance médicale. En posant bien l'indication et les interactions médicamenteuses. Sinon, on va avoir quelques accidents, c'est évident.
◆ NEXUS : A combien de personnes avez-vous prescrit ce médicament dans toute votre carrière ?
Pr Christian Perronne : J'en ai prescrit à des milliers de patients depuis 20 ans. J'ai eu zéro mort. Parfois j'ai demandé l'avis du cardiologue.
◆ NEXUS : Vos confrères aboutissent-ils à la même conclusion ?
Pr Christian Perronne : Oui, il y a des patients qui en prennent pendant des années de en cas de lupus par exemple.
◆ NEXUS : Avez-vous eu beaucoup de soutiens pour votre pétition récemment lancée avec Philippe Douste-Blazy ?
Pr Christian Perronne : Oui, énormément, on est à 500 000 signatures. Ce qui est énorme, c'est un record. J'ai reçu plein de témoignages de professeurs d'université, académiciens, qui me remercient. Au niveau politique, les gens doivent être en train de se poser des questions. En Italie, un décret du directeur général de la santé paru au Journal officiel italien il y a trois semaines, autorise tous les médecins italiens, y compris les médecins généralistes, à prescrire de l'hydroxychloroquine. D'ailleurs, il y a eu une baisse significative de la mortalité en Italie, je ne sais pas si c'est lié à cela mais peut-être. Et les Américains ? Contrairement à la France, ça fait plus d'un mois qu'ils ont fait des stocks de guerre de ce médicament, des millions de doses. Ils ont raflé une bonne part de ce qui était sur le marché.
◆ NEXUS : Que préconiseriez-vous pour gérer au mieux cette épidémie ?
Pr Christian Perronne : Je pense qu'il faudrait plutôt que de confiner toute la population, confiner les personnes fragiles, les malades ainsi que les porteurs du virus non malades. Pour ce faire, il faut avoir des capacités de dépistage du virus par PCR considérables. Il faudrait aussi dépister largement par la recherche d’anticorps (sérologie) toutes les personnes déjà immunisées, car des personnes ont été infectées sans le savoir. Les personnes non immunisées devraient porter un masque. Ça demande une énorme logistique. Des données préliminaires suggèrent que l'hydroxychloroquine pourrait aussi avoir un effet protecteur. On pourrait en donner à petite dose à des personnes à risque. Je crois plus à une telle stratégie que de garder le pays sous cloche. Ça va être catastrophique sur le plan économique. Il faut réfléchir à ça, prudemment, sans courir de risques de toxicité médicamenteuse, bien entendu.
◆ NEXUS : Vous pensez quoi de l'initiative d'Estrosi d'être passé outre les recommandations de l'Etat et d'avoir contacté directement Sanofi pour avoir de l'hydroxychloroquine ?
Pr Christian Perronne : Quand il y a un blocage étatique comme celui-là, je comprends que des gens prennent des initiatives. Il y a aussi le tribunal de Guadeloupe qui a ordonné qu'on approvisionne le CHU de Pointe-à-Pitre avec ces médicaments. Je sais par un médecin de Pointe-à-Pitre que ça marche très bien.
◆ NEXUS : Est-ce que vous attendez quelque chose du Conseil de l'ordre national des médecins qui semble réticent alors que celui de Paca a soutenu le protocole de Raoult ?
Pr Christian Perronne : Ce qui m'a déçu, c'est le communiqué du Conseil de l'ordre national qui a dit qu'il fallait attendre le résultat des études. Ils sont sous influence. L'Académie de médecine, l’Académie de pharmacie, le Conseil de l'ordre, le CNGE (Conseil national des généralistes enseignants) ont tous dit qu'il fallait respecter les canons de la méthodologie et attendre, attendre... La médecine devient folle, c'est une pandémie qui survient une fois par siècle. Il faut agir. Il faut arrêter de mettre des blocages partout, administratifs, théoriques.
◆ NEXUS : Comment toutes ces institutions, qui sont censées être garantes d'une certaine neutralité, arrivent à un consensus pour dire non à l’hydroxychloroquine ?
Pr Christian Perronne : On voit bien qu'il y a beaucoup de leaders d'opinion qui sont bourrés de conflits d'intérêts notamment avec Gilead et Abbvie. Ce sont les producteurs des molécules concurrentes de l’hydroxychloroquine. Donnons un exemple que tout le monde peut comprendre : quand la pénicilline a été utilisée on avait 100% de guérison sur la pneumonie à pneumocoque au bout de 10, 12 malades, et c'est devenu le traitement de référence. Il n'y avait pas, à l’époque, de types assez fêlés pour demander un tirage au sort entre 500 malades traités et 500 recevant un placebo. C'est choquant cette médecine et parfois criminel. Donc ça n'a aucun sens de demander un placebo et des groupes témoins dans ces circonstances. Quand vous voyez la mortalité sur la dernière étude de l’IHU de Marseille sur plus de 1000 malades, il y a quand même 98% de guérison !
◆ NEXUS : Est-ce qu'on pourrait presque dire qu'il y a un déni de réalité ?
Pr Christian Perronne : Tout à fait. Les gens n'ont plus les pieds sur terre. Tout ce qui n'est pas évalué selon leur méthode n'existe pas. Et toute cette méthodologie n’améliore pas la vie des malades. Avant tout ça, la médecine marchait très bien, cela fonctionnait par comparaison d'écoles, ça fonctionnait ainsi jusque dans les années 70, 80. Ce mode de comparaison contre placebo a été imposé par l'industrie pharmaceutique pour faire enregistrer leurs médicaments dans les agences internationales et pour vendre leurs produits. Ce qui est désolant là-dedans, c'est que tout ce qui n'a pas été évalué selon cette méthode, pour beaucoup de mes collègues, n'existe pas. La médecine est tombée sous la coupe de l'industrie. Regardez en Allemagne, les médecins sont libres, mais en France on est en train de dérailler. J'ai l'impression de vivre dans une dictature administrative.
◆ NEXUS : Justement, qu'est-ce que vous pensez du dernier décret sur le Rivotril ?
Pr Christian Perronne : Autant je suis pour les soins palliatifs quand quelqu'un est mourant, c'est normal de l'accompagner. Mais là, beaucoup de médecins ont trouvé ça choquant et cela en a fait hurler certains.
◆ NEXUS : Pourquoi ?
Pr Christian Perronne : Déjà on publie un décret où on interdit aux médecins de soigner les malades avec l’hydroxychloroquine qui marche probablement, puis un autre texte qui les autorise à injecter par voie intraveineuse aux patients du Rivotril pour accompagner leur fin de vie. La juxtaposition des deux textes a été reçue de façon très violente.
◆ NEXUS : Pour bien comprendre, le Rivotril n'est utile que pour raccourcir la durée de vie ?
Pr Christian Perronne : C'est un cousin un peu lointain du Valium, un calmant à la base, qu'on utilise en médecine, à petites doses, souvent dans les centres antidouleur, pour soulager. Ça peut agir sur les irritations nerveuses. On l'utilise à plus fortes doses en réanimation et dans les soins palliatifs pour soulager la souffrance des malades en fin de vie. On interdit aux médecins de traiter les malades par l’hydroxychloroquine qui, soi-disant, est une substance vénéneuse, mais on leur donne le droit d’injecter le Rivotril pour la fin de vie. Même si tous les médecins sont favorables aux soins palliatifs quand il n’y a plus d’autre solution, les médecins de ville vivent mal ce contraste. Regardez la lettre du docteur Nathalie Caradot à ce sujet.
◆ NEXUS : L'utilisation de cette bithérapie hydroxychloroquine/azithromycine peut-elle permettre la sortie du confinement ?
Pr Christian Perronne : Finalement, ça peut accompagner le déconfinement. Regardez les Allemands, ils n'ont pratiquement pas confinés la population et ils ont un taux de mortalité ridicule, ils ont dépisté massivement les gens à risque et ont isolés les malades et les personnes fragiles. En Corée où ils n'ont pas fait le confinement total, tout le monde portait un masque, et l'épidémie est très faible. Mais nous, on nous annonce qu'on aura les masques au mois de juin, c'est sympa.
◆ NEXUS : On a l'impression que le confinement est la solution de facilité et qu'il y a beaucoup d'autres méthodes plus efficaces.
Pr Christian Perronne : Oui, ça demande beaucoup de finesse et d’organisation, cela demande d'avoir des épidémiologistes qui ne soient pas dogmatiques. Il faut anticiper. Quand on voit que le directeur général de la santé, le 30 janvier, a commandé un million de masques, un million pour toute la France, pour 67 millions de Français... Il aurait fallu dès le début en commander des dizaines de millions. La présidente de Bourgogne Franche-Comté est une femme sérieuse, prudente, elle avait commandé en février 2 millions de masques en Chine pour ses Ehpad. L'avion est arrivé début avril, l'Etat a saisi les stocks. On se croirait au Far West...
◆ NEXUS : Il y aura des conséquences sanitaires du confinement, selon vous ?
Pr Christian Perronne : On voit déjà des cas d'alcoolisme, de violences conjugales, de gens qui font des infarctus la nuit car le 15 ne répond plus, qui meurent chez eux, tous les gens qui ont des cancers et des chimiothérapies reportées, des interventions reportées, même si ce n'était pas hyper urgent, mais qui sont dans une angoisse totale. Pour tous les malades d'autres maladies, il va y avoir des effets collatéraux, c'est évident.
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